Activité – Statut et représentations du genre féminin dans la société française du XIXe siècle

PROBLÈME À RÉSOUDRE

Dans la France du XIXe siècle, les femmes ont-elles la possibilité de résister au rôle qui a été assigné à leur genre par la société ?

DOCUMENTS

Document 1 – Portrait d’une famille bourgeoise vers 1880


Source : Tous les bonheurs, huile sur toile du peintre belge Alfred Stevens, vers 1880, 67,5 × 53,5 cm. Musée d’Orsay, Paris.

Définitions

◼︎ Code civil : compilation de lois et de règles en matière de droit civil (= qui régit les rapports entre des individus, par opposition au droit public, qui régit les rapports des individus avec l’État, et au droit pénal, qui régit les rapports entre un individu et la société).
◼︎ Divorce : rupture d’un contrat de mariage, par consentement mutuel ou à la demande d’un des époux. Autorisé à l’époque romaine, le divorce avait été progressivement interdit par l’Église catholique au Moyen Âge, puis rétabli par l’Assemblée nationale en 1792, conservé dans le Code civil, mais finalement abrogé en 1816.
◼︎ Féminisme : mouvement en faveur des femmes. Le mot apparait dans les années 1830 et recouvre une grande diversité de revendications. En France, les premières organisations féministes sont fondées à partir de la IIIe République.
◼︎ Genre : ensemble de représentations et de valeurs attribuées au sexe biologique (mâle ou femelle). Le genre est construit par la société ; il varie donc en fonction des cultures et du contexte historique.
◼︎ Misogynie : mépris ou hostilité vis-à-vis des femmes (ce sentiment n’a pas de relation avec l’orientation sexuelle et peut être exprimé par des individus aussi bien hétérosexuels qu’homosexuels).

Document 2 – Les droits des femmes en France selon le Code civil


Du mariage (Livre I, Titre V)
« Art. 213 – Le mari doit protection à sa femme, la femme obéissance à son mari.
Art. 217 – La femme ne peut donner, hypothéquer1, acquérir un bien sans le concours de son mari. »

Du divorce (Livre I, Titre VI)
« Art. 229 – Le mari pourra demander le divorce pour cause d’adultère de sa femme.
Art. 230 – La femme pourra demander le divorce pour cause d’adultère de son mari, lorsqu’il aura tenu sa concubine dans la maison commune. »

Des contrats et des obligations conventionnelles en général (Livre III, Titre III)
« Art. 1124 – Les incapables de contracter2 sont les mineurs3, les interdits4, les femmes mariées. »

Extraits du Code civil ou « Code Napoléon », 21 mars 1804.

  1. Droit accordé à un créancier sur un bien immeuble en garantie d’une dette, sans que le propriétaire du bien en soit dépossédé.
  2. Passer un contrat (par exemple, un contrat de travail).
  3. Individus âgés de moins de 21 ans.
  4. Individus souffrant de déficience mentale.

Document 3 – Une légitimation du statut d’infériorité des femmes par un médecin


« Il faut que l’homme soit fort, audacieux, entreprenant ; que la femme soit faible, timide, dissimulée. Telle est la loi de la nature. La faiblesse musculaire de la femme est liée avec une plus grande sensibilité nerveuse. Incapable de supporter les fatigues, de résister au choc tumultueux des grandes assemblées d’hommes, elle leur a laissé ces forts travaux ; elle ne s’est point mêlée aux discussions d’affaires publiques, auxquelles doit toujours présider une raison sévère et forte. En un mot, la femme a dû laisser aux hommes les soins extérieurs et les emplois politiques ou civils. Elle s’est réservée les soins intérieurs de la famille et ce doux empire domestique par lequel seul elle devient tout à la fois respectable et touchante. »

Pierre Jean Georges Cabanis1, Rapports du physique et du moral de l’homme, 1802.

  1. Médecin français, influencé par la philosophie des Lumières, qui a contribué à refonder la médecine (profession, enseignement, hôpitaux) à l’époque révolutionnaire.

Document 4 – George Sand dénonce la place des femmes dans le mariage


« — Qui donc est le maitre ici, de vous ou de moi ? qui donc porte une jupe et doit filer une quenouille1 ? Prétendez-vous m’ôter la barbe du menton ? Cela vous sied bien, femmelette !
— Je sais que je suis l’esclave et vous le seigneur. La loi de ce pays vous a fait mon maître. Vous pouvez lier mon corps, garrotter2 mes mains, gouverner mes actions. Vous avez le droit du plus fort, et la société vous le confirme ; mais sur ma volonté, Monsieur, vous ne pouvez rien, Dieu seul peut la courber et la réduire. Cherchez donc une loi, un cachot, un instrument de supplice qui vous donne prise sur elle ! c’est comme si vouliez manier l’air et saisir le vide !
— Taisez-vous, sotte et impertinente créature ; vos phrases de roman nous ennuient.
— Vous pouvez m’imposer silence, mais non m’empêcher de penser. »

Extrait du roman Indiana de George Sand, 1832.

  1. Instrument servant à filer (la laine, le lin…).
  2. Attacher fermement.

Biographie – George Sand (1804-1876)

Écrivaine française, de son vrai nom Aurore Dupin, mais utilisant comme nom de plume George (sans « s ») Sand, elle consacre ses premiers romans, Indiana (1832) et Lélia (1833), à la dénonciation du mariage. Elle-même se sépare officiellement de son mari à une époque où le divorce est interdit. Elle fait scandale en s’habillant parfois en homme, ce qui est pour elle une manifestation d’indépendance et de liberté.

Document 5 – Caricature d’un salon littéraire avec George Sand (personnage debout)


Source : estampe coloriée réalisée à partir d’une gravure de Gérard Fontallard, parue dans Aujourd’hui : Journal des ridicules, 15 octobre 1839.
N.B. Au XIXe siècle, le terme « bas-bleus » (utilisé dans la légende) sert à désigner péjorativement les femmes s’intéressant aux choses intellectuelles.

Biographie – Madeleine Pelletier (1874-1939)

Madeleine Pelletier a été la première femme médecin diplômée en France. Féministe radicale, elle défend, en plus du droit de vote des femmes, le droit à l’avortement. Mettant en adéquation ses idées et ses actions, elle pratique illégalement de nombreuses interruptions volontaires de grossesse (IVG) au cours de sa carrière. Elle voit par ailleurs dans la maternité une des causes majeures de l’oppression des femmes par les hommes et maintient toute sa vie une virginité militante. Se présentant comme les hommes de son époque (costume, canne, chapeau et cheveux court) et portant même un révolver, elle plaide pour une disparition du mariage et même du genre féminin. Mais ses idées sont parfois mal reçues, même par les communistes et les féministes, qui jugent ses positions extrêmes. En 1939, elle est arrêtée sur dénonciation pour « crime d’avortement » et internée dans un asile psychiatrique.

Document 5 – Entretien avec l’historienne Christine Bard sur Madeleine Pelletier


Source : extrait de la vidéo Madeleine Pelletier, doctoresse féministe, Culture Prime / France Culture, 2 juin 2020.

ENQUÊTE

RÉPONSE AU PROBLÈME

Réponds au problème de départ en t’aidant de tes réponses aux questions de l’enquête. N’oublie pas de structurer ta réponse ! ☺︎